3. Vosges : l’esprit de la forêt 3. Vosges : l’esprit de la forêt

On dit qu’il y a, dans les Vosges, une fée dans chaque vallée. Sont-elles encore nombreuses à se cacher sous les couverts de chênes ou de sapins ? Elles auraient la place de s’y mouvoir en toute tranquillité : les 280 000 hectares de forêt vosgienne recouvrent près de la moitié du département. De là est née une économie florissante. Avec 1,6 million de mètres cubes de bois produits annuellement, le territoire s’enorgueillit d’être le premier forestier de France. Un secteur qui représente 10 % de ses emplois !

À la fin des années 2000, le conseil départemental a souhaité pousser le potentiel touristique de la « sylvothérapie », en lien avec les filières hôtelière et agricole. C’est ainsi qu’est née la marque « FORê », en 2012. Celle-ci propose « un produit touristique basé sur le bien-être procuré par la forêt et les ressources naturelles telles que les petits fruits et plantes », peut-on lire dans une brochure. Elle fédère aujourd’hui une trentaine d’hôtels, restaurants, stations thermales et Spa. Treize producteurs ont également rejoint le mouvement pour fournir les gammes « Spa et bien-être » (huiles, crèmes, eaux florales…) et « Goûts et saveurs » (sirops, infusions, condiments, confitures…).

« Un nid de passionnés »

Parmi eux, « La Ferme du bien-être », à côté de Gérardmer, apporte son savoir-faire dans la distillation d’huiles essentielles et le séchage de plantes. « C’est une agriculture du grammage, nous faisons de la cosmétique agricole », s’amuse Clément Urion, l’un des trois associés du Gaec. 70 % des plantes qu’il transforme sont cultivées sur l’hectare et demi de l’exploitation. Le reste provient de la cueillette en sous-bois : sapin, arnica, ail des ours, gratte-cul, brimbelle (nom local de la myrtille sauvage)… Les lieux de récolte sont bien gardés. « C’est le coin qui fait le cueilleur ! » Cent cinquante références sortent ainsi de la ferme, en grande majorité vendues en direct, dans le beau magasin qui longe la route menant à Épinal. 5 % de ses produits sont estampillés « FORê ». « Nous augmenterons cette part avec le temps mais elle restera toujours marginale car il ne faut pas nuire aux autres circuits de distribution », explique Clément.

Pour lui, l’intérêt se trouve surtout dans la démarche collective : « L’intégration du réseau nous a demandé d’harmoniser les recettes entre producteurs. Ce travail bénéficie à tous les membres, estime-t-il, car il permet de développer les produits locaux dans une logique haut de gamme. » Une manière, selon lui, de lutter contre les « aberrations » qui font qu’aujourd’hui, les fameux bonbons « La Vosgienne » sont fabriqués en Espagne…

Assurer la communication

« C’est la fierté du territoire qui lie les partenaires entre eux, insiste Armelle Barbière, animatrice marketing de la marque. Nous travaillons avec un nid de passionnés ! » Dans son chalet restaurant Le Collet, près du col de la Schlucht, le chef Olivier Lapôtre intègre les produits de la gamme « Goûts et saveurs » à ses plats et le signale sur la carte en y apposant le logo. « J’ai même l’idée de créer un menu FORê », confie-t-il. Sa pierre à l’édifice. Pour lui, le packaging commun permet de « parler d’une seule voix » et de mieux faire connaître les talents vosgiens.

Le conseil départemental l’a bien compris et fait de la marque un axe prioritaire pour la promotion de la culture locale. « En tant que collectivité, nous ne pouvons pas vendre directement mais nous assurons la communication, souvent en association avec les boutiques ou les restaurants ou sur des salons, jusqu’à dix par an », précise Armelle Barbière. Le soutien est aussi technique : plus de 250 000 euros ont été investis en analyses, recherche et développement.

Il est pour l’instant compliqué de chiffrer le succès de cette initiative. Les études détaillées manquent mais « les retours sont excellents et nos offres constituent de bons produits d’appel auprès des visiteurs », assure Armelle. Saison après saison, la jeune marque s’impose dans le paysage montagnard. L’esprit de la forêt vosgienne a trouvé ses hérauts.

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